Le jour où les tunisiens ont décidé de ne plus se taire
Le 17 janvier 2011, Lucas Mebrouk Dolega est décédé, à Tunis, trois jours après qu’il a reçu une bombe lacrymogène à la tête, rue Gandhi, par un policier tunisien. C’était le 14 janvier, Lucas et ses confrères savaient qu’un soulèvement populaire aura lieu dans notre pays. Ils prenaient comme armes leurs appareils photos et descendent au centre ville de Tunis pour transmettre au monde entier la rage d’un peuple.
Plusieurs de mes amis ont vu lucas, le jour même, avant le tragique accident, en train de longer le centre ville du Bab Bhar jusqu’au devant le ministère de l’intérieur. Plus de 500 photos, entre manifestants, policiers, tires de bombes lacrymogènes, slogans, étouffements, sourires, rages et amour pour son métier… Lucas était à sa dernière minute collé à son boitier … voulant prendre des photos de plus ou encore ne voulant jamais se taire …
Le film des événements
du 14 janvier.
Lucas (de dos)
en première ligne.
Au centre : à 16 h 23,
il est touché près de l'œil.
En bas : les policiers témoins de
la scène ne s’attardent pas...
( Photos Bruno Stevens - Matthias Bruggmann)
du 14 janvier.
Lucas (de dos)
en première ligne.
Au centre : à 16 h 23,
il est touché près de l'œil.
En bas : les policiers témoins de
la scène ne s’attardent pas...
( Photos Bruno Stevens - Matthias Bruggmann)
Après quatre mois, nous étions quatre à la même heure, sur les mêmes lieux, dans le même coin où Luca était tué. L’initiateur de cette timide commémoration, Hamid Bouali nous parlait de l’itinéraire du photographe défunt avant son meurtre. Et j’ai senti comme si son âme nous entourait pour corriger un détail au récit de Hamid ou pour prendre encore une photo de l’après soulèvement de la Tunisie ou pour nous partager notre bavardage. J’imaginais ce qu’il pourrait nous dire après quatre mois … et j’étais heureuse mais aussi affligé de me sentir concernée par ce photographe inconnu mais cher à mon cœur …
Nous étions quatre à penser en ce moment à Lucas qui avait reçu une bombe lacrymogène à la tête. Et nous avons réussi à réaliser l’un de ses souhaits. C’est de ne plus jamais se taire … à 16.20h, nous étions quatre à bavarder, à parler et à rêver d’un jour où Lucas sera commémoré comme il se doit … comme un héros de la liberté d’expression, de parole et de rêve ….
photographie symbolique de Emir Landolsi
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