Sur les gros blocs
de roches qui parsèment le chemin de Kilimandjaro, j’étais un minuscule point
bleu perdu entre un ciel noir et une terre blanche…
Je décris dans cette note, ce que j’ai vécu
durant la dernière étape de l’ascension (de kibo à Uhuru). On a
commencé à monter vers minuit. Il faisait extrêmement froid (3° C). Il y avait peu
d’oxygène à respirer et il nous restait 7 heures de marche pour arriver au
Sommet de l’Afrique.
Sans forcément
être philosophe, prophète ou héros d’un roman rêveur, on plonge malgré soi dans cet état de réflexion à la fois existentielle et absurde : Continuer ou
arrêter? Grimper la vie ou descendre vers la mort ? Céder à l’imaginaire
nocturne ou rêver de la lumière du soleil ? Quoi de plus dur à
inventer: une vie au sommet ou le sommet de la vie ? Peut-t-on vraiment choisir?
Peut-t-on rester indifférent ?
A
Kilimandjaro, on n’a pas vraiment le choix. C’est la montagne qui décide de
notre sort.
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Des cris jaillissent de nulle part. Deux femmes, pleurent … des silhouettes
blanches courent dans ma direction, me traversent, puis, disparaissent dans une sorte de trous ou de grottes. Je ne cherche pas à les attraper. Je suis
fatiguée et je ne veux plus entendre les voix tordues qui s’acharnent sur moi …
Sous mes pieds, la neige dévore
mes pas et efface mes traces. Je ne conteste pas. De toute façon, je m’en fous.
Je n’ai jamais cherché à garder ou à
laisser une empreinte. D’ailleurs,
j’ai toujours pensé que ma mort ne doit laisser
ni larmes ni sourire. La neige le sait et elle se moque
de moi en dévorant mes pas … elle sait que, de toute manière, je n’ai pas le
choix même si je fais semblant d’avoir des alternatives.
Tout est noir.
C’est la nuit. Elle est devant moi, au dessus de moi, à
mes côtés et à mon intérieur …
La nuit est une couleur totalitaire. Elle ne partage pas l’espace. Elle
veut tout ou rien du tout. Je la déteste ! Cette arrogante, blessante et égocentrique nuit … Elle se moque
de moi en tourmentant l’air que je respire. Ce n’est pas l’altitude qui me tue,
c’est la nuit …
Pour échapper
à son noir taciturne, je reviens à mes hallucinations. Alors, les silhouettes blanches
reviennent, sortent de leurs trous, et avancent doucement. Maintenant que je
les laisse faire, elles ne sont plus pressées. Mais elles n’avancent pas vers
moi. Elles se précipitent vers le sommet et moi qui me fait dévorer mes pas par
la neige, je m’imagine en train de suivre leur course. Je m’imagine en
plusieurs scènes. Parfois, en train d’avancer et parfois en train de tomber. J’avance
ou je n’avance pas. Je ne sais plus. En réalité, c’est la neige qui avance sur
moi, autour de moi, sous moi, de partout, elle avance et m’efface de mon
indifférence. Elle sait très bien que je n’ai pas vraiment le choix… elle sait
que je suis fatiguée et que je ne peux plus respirer… elle sait qu’il ne me reste
qu’un tout petit rêve qui me tient à la vie …
Quelques pas
encore en avant. Et une voix qui m’accompagne ordonne : « avance !
Ne t’arrête pas ! » Je fais un
signe d’obéissance par la tête et je chemine. Un pas, deux pas, trois pas … un
moment de silence, deux moments de silence, trois moments de silence … et
encore un pas …
Les cris se
multiplient. Finalement, j’échappe à la dernière pensée et je tombe … je vois
les visages de femmes qui n’arrêtent pas d’hurler. Je les vois détachés du noir qui m’entoure. Je ne résiste pas … sous la pression d’une
profonde douleur au creux de mon épaule. Je cède à l’imaginaire. Après tout, c’est
moins pénible que la neige et la nuit. Les visages s’approchent de moi …. Les silhouettes
s’agitent et reviennent sur leurs pas en courant « Relève toi et avance !
… » Non ! Pourtant, La neige me dévore toute entière… je ne sens plus
la douleur. Je ne sens plus le froid … je me laisse guider par les silhouettes
et les voix… je me sens plus légère que jamais.
Le temps passe
et je me réveille ! Je suis toujours entourée par la neige. Les silhouettes
blanches, les visages de femmes et les voix ont disparu … de ma tête. Je
suis au sommet de ma vie ! Au bout de mes rêves ! Au désir d’avoir le
soleil encore plus proche qu’un souhait …
j'aime , vs sortez avec quel groupe ? groupe de decouverte ou koi ?
RépondreSupprimerHenda, je viens de decouvrir ton blog. C'est vraiment genial. Je viens de faire aussi le Kilimandjaro ce mois de Fevrier passe. J'ai collecte des fonds pour une action caritatives pour les enfants demunis en Tunisie.
RépondreSupprimerfais moi savoir quand tu seras en Tunisie. mon email: henda.chennaoui@gmail.com
RépondreSupprimerfort et intemporel!
RépondreSupprimermerci Henda...
même 15 mois plus tard